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Dix clefs pour une conversion écologique réussie

Lu ici:

EXCLUSIF MAG – Changer de comportements n’est vraiment possible qu’en approfondissant notre rapport à la Création. La parole à François-Xavier et Amélie Huard, cathos, écolos et initiateurs du mouvement « Chrétiens, changeons ! ».


«Mariés depuis 2003, parents de quatre enfants âgés de 4 à 11 ans, nous avons entamé un lent chemin de conversion à la naissance de notre aîné en 2006. De lectures en rencontres, nous avons plongé au fil des années dans un milieu écologiste profondément engagé. L’alignement entre actes et convictions que nous avons observé chez beaucoup d’entre eux nous a touchés et nous a renvoyés, nous catholiques engagés, à nos propres incohérences.

En 2011, nous avons commencé à prendre la parole publiquement en lançant avec d’autres le mouvement des “Chrétiens indignés”. Entre 2013, le mouvement “Chrétiens, changeons !”, que nous avons animé pendant trois ans à Clermont-Ferrand, invitait chacun, et en particulier les chrétiens, à entendre l’appel à la conversion à une écologie intégrale qui nous est adressé. Nous témoignons ici du lent et beau chemin qu’est celui d’une conversion des profondeurs.

Nous aimons rappeler souvent trois points fondamentaux. D’abord le fait que la situation contemporaine de l’humanité est complexe : la réponse ne peut donc qu’être foisonnante. La crise écologique appelle une rupture avec le paradigme cartésien qui résout les “grands” problèmes en les découpant en “petits” problèmes juxtaposés. Laudato si souligne au 144 : “Comme la vie et le monde sont dynamiques, la préservation du monde doit être flexible et dynamique.” Il n’y a donc pas de place pour les postures idéologiques.

Ensuite, la conversion écologique nous fait passer de l’examen des symptômes à celui des causes profondes. Car notre vie quotidienne regorge d’exemples qui manifestent les réponses superficielles que nous apportons trop souvent à nos contradictions. En disant que nous ne changeons pas nos modes de vie car “nous manquons de temps ”, “notre vie est trop contraignante”, “nous travaillons beaucoup”, “nous sommes fatigués”, etc., nous délaissons les causes réelles, nous n’interrogeons pas les raisons pour lesquelles nous menons une vie si pleine de contraintes paralysantes.

Enfin, il faut avoir à cœur d’installer un dialogue authentique avec tous ceux qui nous précèdent sur ce chemin de conversion – nombre d’entre eux ne sont pas chrétiens ! Sachons les trouver et découvrir ce qu’ils ont à nous apprendre. Nos quartiers fourmillent de personnes remarquables qui cheminent silencieusement et qui ne demandent qu’à partager leurs idées… et leurs interrogations spirituelles, profondes et authentiques. De façon inconsciente, beaucoup attendent des chrétiens un témoignage de foi assis sur un témoignage existentiel cohérent. L’écologie est une magnifique opportunité pour témoigner du Christ.


Ces fondements posés, voici dix points de repère pour guider nos choix quotidiens.

1. D'abord ne pas nuire

(“Primum non nocere”). Comment vivre sans nuire ? Produire et consommer sans nuire ? Se déplacer, voyager, gérer son argent, travailler sans nuire ? Cela vaut en particulier pour notre alimentation, dont les habitudes ont des conséquences directes sur l’ensemble des êtres vivants de notre Terre, et sur notre propre santé. Ainsi, en journée d’évangélisation, si je ne prends pas soin de mon propre corps par une alimentation saine, je passe à côté d’un témoignage de cohérence. Car évangéliser, ce n’est pas seulement professer ma foi. C’est aussi laisser voir la force unifiante du Christ, y compris à travers les petites choses.


2. Moins de biens, plus de liens.

Beaucoup de choses vont en effet prendre plus de temps, mais le changement réside dans la manière avec laquelle vous faites les choses : avec les autres, et avec votre cœur. C’est pour cela qu’acheter ses livres chez un libraire a plus de valeur existentielle que de les acheter sur Amazon.


3. Redécouvrir le repos et le silence.

Apprendre à ne rien faire, à se reposer en sanctuarisant par exemple le dimanche, c’est “inclure dans notre agir une dimension réceptive et gratuite qui est différente d’une simple inactivité”, nous dit le pape dans Laudato si ( 237).

« La conversion écologique nous fait passer de l’examen des symptômes à celui des causes profondes. »


4. Le choix de la beauté

est un excellent indicateur de ce qui est bon, car il n’y a pas d’écologie sans émerveillement. Les zones commerciales qui cernent nos villes sont une pollution grave. Le mode de vie des moines, qui ont su rebâtir à leur manière un environnement propre à l’émerveillement et à la contemplation, reste un modèle pour notre civilisation.


5. Garder en toute chose le sens de la mesure,

retrouver la notion de seuil. Ainsi la mobilité : progrès social il y a cinquante ans, qu’est-ce qui justifie aujourd’hui l’extension sans fin du réseau autoroutier ou TGV ?


6. L’essentiel pour vivre est déjà disponible

et même abondant, nous ne manquons de rien : la recherche de la sobriété s’appuie sur cette conviction bien chrétienne. C’est la société de consommation qui a installé dans nos esprits la conviction que nous manquons toujours de quelque chose pour être heureux maintenant.


7. La gratitude

engage à moins jeter, à ne pas gaspiller ce dont nous avons besoin. Bénir son pain, c’est sortir d’une logique d’accaparement, reconnaître ce qui a été nécessaire pour que je puisse m’en nourrir : la pluie, la terre, le travail de l’agriculteur et du boulanger, et mon propre travail qui me donne les moyens d’en acheter tous les jours.


8. La joie :

nous qui sommes riches et tristes, prenons exemple sur la vitalité parfois plus joyeuse des peuples des pays pauvres. “Que nos luttes et notre préoccupation pour cette planète ne nous enlèvent pas la joie de l’espérance”, dit aussi François (Laudato si 244) à ceux qu’accable la probabilité d’un avenir douloureux.


9. La véritable écologie est intérieure.

C’est ce qui change dans mon cœur profond qui détermine le changement du monde. Les sobres ne sont pas des frustrés : ils ont appris à s’aimer tels qu’ils sont, à accepter de transformer leur vie lentement en cessant de juger leurs contemporains et en renonçant à la violence, qui est souvent tournée contre soi-même dans une exigence mal placée ou orgueilleuse. Travailler sur soi et sur ses souffrances, notamment en accueillant avec bienveillance et discernement les multiples thérapies d’accompagnement dont notre époque est riche, est un moyen sûr d’enraciner sa conversion écologique au plus profond de son existence.


10. Enfin, la prière !

Nous avons entendu un jour une dame nous interpeller spontanément. Elle comparait le défi écologique à la traversée de la mer des Roseaux par le peuple hébreu dans le livre de l’Exode... On ne quitte pas une maison d’esclavage pour une terre promise, mais inconnue, sans tenir son cœur tout près du Christ. »


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