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Contraception: des femmes interpellent les pouvoirs publics sur le stérilet Mirena

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Le stérilet hormonal Mirena, fabriqué par les laboratoires Bayer, est accusé par de nombreuses femmes de provoquer des effets secondaires lourds auxquels elles ne s'attendaient pas. Le problème rencontre l'indifférence de nombreux gynécologues.


Est-ce un nouveau scandale sanitaire ? Sur Facebook sont apparus de nombreux groupes dédiés aux effets secondaires du stérilet hormonal Mirena, l'un des plus souvent posés. Sur ces groupes, des centaines de femmes échangent et expliquent les problèmes de santé qu'elles ont rencontrés après la pose de ce moyen de contraception.


Migraines, mycoses vaginales, maux de tête, baisse de la libido, sautes d'humeur, dépression, prise de poids, acné, perte de cheveux, pilosité excessive, vertiges... Ce dispositif intra-utérin, commercialisé depuis une dizaine d'années, est accusé d'effets secondaires aussi variés qu'handicapants.


le stérilet mirena, un stérilet qui coupe vos règles mais a côté perte de cheveux, poils ( aux endroits inhabituel menton etc....)

— ELNE (@Evawaarner) 7 mai 2017


La polémique monte déjà à l'étranger. Aux Etats-Unis, une plainte collective a été déposée contre le groupe Bayer «pour les possibles cas de tumeurs et d'hypertensions cérébrales causées (...) par le Mirena», explique TV5 Monde. En Espagne, «2 900 plaintes» ont été déposées contre Mirena, selon la chaîne d'information. En France, des témoignages inquiétants s'accumulent sur les réseaux sociaux. Le plus troublant ? La plupart des femmes qui s'expriment dénoncent un manque d'information de la part de leurs gynécologues, voire un refus de certains praticiens de lier les symptômes dont elles se plaignent au port du stérilet et un manque de contrôle après la pose.


«Je savais que je n'étais pas folle»

Céline, 37 ans, fait partie de l'un de ces groupes. Elle a gardé un stérilet Mirena pendant cinq ans et demi, entre 2009 et 2015 . «Quelques mois après la pose je me sentais dépressive, j'avais la gorge serrée tout le temps, je pleurais, confie-t-elle. J'ai eu ma première grosse crise d'angoisse un an après la pose. Ensuite, je faisais 10 à 15 crises par jour, qui mêlaient angoisse, tétanie et spasmophilie. Je suis allée voir des médecins et des psychologues qui m'ont fait prendre anxyolitiques et anti-dépresseurs mais ça ne servait à rien. Je savais que je n'étais pas folle, avant la pose du stérilet j'étais très joyeuse. Au bout d'un moment, j'ai pensé au stérilet, comme c'était la première fois que j'en avais un. C'est un médecin généraliste qui m'a dit de l'enlever. Je suis allée voir deux gynécologues, qui ont refusé sous prétexte que ce n'était pas le moment et que je devais plutôt me rendre chez un psy. La troisième fois, j'ai menti en disant que je voulais avoir un bébé et là, on me l'a enlevé sans chercher à comprendre. En plus de tout ça, j'ai pris 27 kilos que je n'arrivais pas à perdre. Résultat, aujourd'hui, j'ai un dérèglement hormonal certainement lié à cela».


Prévenir l'ANSM


Le but de cette mobilisation sur les réseaux sociaux est d'encourager les femmes victimes de ces problèmes à déposer des informations de pharma-covigilance, des alertes permettant à l'Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des Produits de Santé de prendre ce problème en considération. La modératrice de l'un des groupes Facebook, qui tient à garder l'anonymat, explique ainsi : «C'est une obligation de déclarer ces effets indésirables à l'ANSM, c'est passible de poursuites ou d'amende si ce n'est pas fait mais la plupart des médecins ne le font pas. C'est trop long à faire pour eux... Mais ce qu'ils ne disent pas, c'est que le patient peut le faire à leur place. Le problème est que la balance risques/bénéfices des médicaments est souvent faussée par le manque de déclarations faites aux agences censées les surveiller. Si les déclarations ne sont pas faites, eh bien le médicament coule des jours heureux et ne sera pas inquiété.»


Avant de faire cette déclaration, la modératrice s'était «fait traiter de folle» par son gynécologue. Mais elle a reçu une lettre du CHU de Poitiers qui reconnaît les effets secondaires, contrairement à son praticien : «Vous nous avez rapporté une perte importante de cheveux, une tachycardie, des douleurs dorsales et articulaires, des infections urinaires, des kystes aux ovaires, une dépression et des crises d'angoisses. Ces effets peuvent être dûs à l'action et à l'imprégnation hormonale du stérilet Mirena. Votre cas à bien été transmis à l'ANSM et enregistré dans la Banque Nationale de Pharmacovigilance».


«Toutes les femmes qui ont fait la déclaration ont aussi reçu ce courrier, c'est pour ça que je les encourage à le faire. Car la plupart des plaintes n'ont pas été enregistrées à l'ANSM, voilà ou est la faille», explique la modératrice. Ce manque de documentation scientifique conduirait, selon elle, les gynécologues à ne pas les croire, entretenant ainsi un cercle vicieux. Pourtant, aussi bien sur le site de Bayer que sur la notice d'utilisation destinée aux patients, ces symptômes sont en grande partie mentionnés.


Des «choix très personnels»

Une implication dans le suivi des médicament confirmée par Bayer: «Dans le respect de la réglementation, nous collectons et analysons continuellement toutes les données que nous recevons sur les événements indésirables (...) dans le but de surveiller le profil de tolérance de Mirena. Le choix d’une contraception et la décision de recourir à une contraception hormonale intra-utérine sont des choix très personnels. Cette décision doit être prise en concertation entre une femme et son gynécologue en considération de ses besoins thérapeutiques et de ses souhaits personnels. Si une femme a des interrogations sur les possibles effets indésirables de Mirena (...) nous l'encourageons à en parler avec son médecin (...) et à consulter la notice d’utilisation du produit, laquelle contient l’ensemble des informations disponibles en conformité avec la réglementation».


L'ANSM a depuis réagi, expliquant qu'elle «a pu constater ces derniers jours une augmentation des déclarations d'effets indésirables susceptibles d'être liés» à Mirena. «Les effets indésirables déclarés font l'objet pour la plupart d'une information dans la notice destinée aux patientes. L'ANSM est néanmoins attentive à cette augmentation des déclarations et à l'apparition de nouveaux signaux qui font actuellement l'objet d'investigations» au niveau européen.


Une «surprise»


Pour Bernard Hédon, président du Conseil National des Gynécologues-Obstétriciens Français (CNGOF), le problème ne viendrait ni de chez Bayer, ni des gynécologues qui ne préviendraient pas des effets secondaires : «Mirena est un stérilet très connu, utilisé chez beaucoup de femmes depuis plus d'une dizaine d'années. Les symptômes qui sortent sont totalement inhabituels et peu fréquents, même s'ils peuvent exister. Il est très rare aujourd'hui de voir de tels problèmes, comme décrits sur les réseaux sociaux. De ce fait, il faut continuer à être à l'écoute des patientes et être encore plus vigilants. Il y a peut-être quelque chose qui nous a échappé, mais pour nous, c'est une surprise». affirme le gynécologue, prévenant cependant que des réunions sur le sujet allaient être organisées afin de répondre à cette vague de témoignages. « Cette affaire ressemble à celle de l'implant Essure, sauf que, pour Mirena, il y a une expérience tellement positive que, pour l'heure, dans la balance, les bénéfices sont très supérieurs à ces éventuels risques. Il a par exemple permis aux femmes ayant des règles abondantes de pouvoir utiliser un stérilet, grâce à un effet de diminution des règles», affirme le gynécologue.


«C'est un stérilet qui délivre un progestatif de deuxième génération très connu au contact de la muqueuse utérine : le lévonorgestrel», explique le gynécologue. Une hormone utilisée dans des pilules de deuxième génération que l'on pourrait qualifier de «basiques», puisque très souvent prescrites et qui ne semblent pas poser de problème sous cette forme. En effet, avec la pilule, la dose d'hormones délivrée dans le sang est beaucoup plus importante que via le stérilet, où les hormones agissent localement et passent très peu dans le sang.


Quand on lui demande si les hormones peuvent tout de même provoquer ce genre de symptômes, Bernard Hédon est affirmatif : «Oui, les hormones d'autrefois - les progestatifs de première génération - peuvent provoquer ce genre de symptôme à doses massives. Mais pour les progestatifs modernes, ces effets secondaires relèvent normalement de l'exception». Il encourage tout de même fortement les patientes victimes de ces symptômes à déposer des déclarations de pharmaco-vigilance afin d'avoir une donnée scientifique permettant de modifier les notices et d'alerter la communauté médicale.

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